mars 27, 2024 - Minute de lectureMinutes de lecture

L’impact du stress sur la maladie parodontale : indicateur de risque ou facteur de risque ?

Les professionnels dentaires sont bien conscients des facteurs de risque largement reconnus et scientifiquement confirmés de la maladie parodontale chez les patients, tels que la génétique, les maladies systémiques (comme le diabète), la composition du microbiote buccal et les habitudes de vie telles que le tabagisme.

Contenu

Mais aujourd’hui, les professionnels de la santé bucco-dentaire sont de plus en plus aux prises avec une condition moins visible et moins comprise, mais qui a sans aucun doute un impact : le stress chronique.

Parce que la santé mentale est très personnelle et parce que la notion de « stress » peut sembler floue (nous ressentons presque tous, parfois, un certain niveau de stress), cela a souvent été un sujet difficile à aborder pour le chirurgien-dentiste avec ses patients. Mais comme de plus en plus de preuves établissent un lien clair entre le stress chronique et le risque de maladie parodontale, c’est un lien qu'il est important d’aborder.

Stress chronique et maladie parodontale : indicateur de risque ou facteur de risque ?

Le stress est généralement classé comme un « indicateur de risque » pour la maladie parodontale par opposition à un « facteur de risque », ce qui signifie que des corrélations sont observées, mais sans preuve solide d’une relation causale.

« Cependant », note Decker et al. dans un article de synthèse pour Periodontology 2000, « à mesure que les preuves dans ce domaine s'accumulent avec des essais cliniques contrôlés supplémentaires, des méthodes de collecte de données plus homogènes et une meilleure compréhension des fondements biologiques de la dysbiose médiée par le stress, de nouvelles preuves suggèrent que le stress chronique et les maladies connexes (dépression, anxiété) peuvent être des facteurs contributifs importants dans la progression de la maladie parodontale / péri-implantaire et la mauvaise cicatrisation des plaies à la suite de traitements parodontaux.

Une autre étude récente de Coelho et al. conclut qu'« il existe une association entre le stress et la parodontite, signalant la nécessité d’une attention multidisciplinaire en considérant l’état psychologique dans la gestion de la santé bucco-dentaire et générale de l’individu ».

Comprendre les mécanismes sous-jacents de cette association peut aider les professionnels dentaires à prodiguer les conseils les plus appropriés à leurs patients.

Pourquoi et comment le stress a-t-il un impact sur le risque de maladie parodontale?

La recherche a identifié un certain nombre de facteurs qui peuvent être en jeu concernant le stress chronique et son influence sur le risque parodontal. L’essentiel est que le stress a des effets physiques réels sur le corps, avec des implications sur le microbiome oral, sur le niveau inflammatoire et sur la santé bucco-dentaire en général.

Une revue systématique de Decker et al. évaluant le stress, la dépression et l’inflammation en tant que facteur de risque collectif pour les maladies parodontales conseille que « les troubles liés au stress devraient être inclus dans la liste des maladies dépistées à l’échelle mondiale, car ils peuvent modifier la biochimie du micro-environnement parodontal local, ainsi que le fardeau inflammatoire systémique global ».

Un phénomène distinct qui a été reconnu est la présence de niveaux de cortisol plus élevés chez les personnes stressées.

« La combinaison de changements dans les réponses inflammatoires et la dépression du système immunitaire causée par des niveaux élevés de cortisol dans le corps, conduisent à la reconnaissance du stress psychologique comme un facteur potentiel de la pathogenèse de maladies chroniques telles que la parodontite », selon Castro et al. « Outre le sang et la salive, l’augmentation des niveaux de cortisol dans le liquide gingival créviculaire était également associée à la gravité de la parodontite. »

« Il est important de souligner l’importance de nouvelles recherches qui relient des niveaux élevés de cortisol dans le corps au niveau de perte osseuse alvéolaire », concluent les auteurs.

Dans leur propre étude du stress et de la parodontite, Pitzurra et al. citent un autre phénomène basé sur « des indications selon lesquelles les neurones sont capables de sécréter des cytokines et des chimiokines pro-inflammatoires qui aggravent les réactions inflammatoires chroniques dans le parodonte et compromettent la capacité immunitaire ».

Tout en reconnaissant que l’impact spécifique du stress sur le risque parodontal et son influence sur les résultats du traitement sont difficiles à estimer cliniquement, les auteurs conseillent que « l’attention et la sensibilisation à la prise en compte du stress en tant qu'un aspect de l’ensemble des facteurs de risque de la parodontite, peuvent diminuer son impact négatif sur la santé immunitaire ».

Comprendre le stress des patients

Bien sûr, la plupart des professionnels dentaires ne sont pas formés en tant que professionnels de la santé mentale. Cela dit, il existe des instruments d’évaluation qui peuvent être utilisés pour acquérir une compréhension de base du stress des patients en tant qu’indicateur de risque possible de maladie parodontale.

La plus connue d’entre elles est peut-être l’échelle de stress perçu, élaborée par le Dr Sheldon Cohen. Il s’agit d’un simple questionnaire de 10 questions « conçu pour déterminer l'importance avec laquelle les situations de la vie sont perçues comme imprévisibles, incontrôlables et pénibles par les répondants ».

Alors que le stress aigu est relativement normal et réagit souvent aux circonstances environnantes (p. ex. une journée chargée au travail ou être bloqué dans les embouteillages), le stress chronique est une condition persistante sur le long terme qui est plus susceptible de provoquer les effets biochimiques et les implications pour la santé bucco-dentaire discutées. L’échelle de stress perçu peut être utilisée pour évaluer si le stress des patients relève davantage de la catégorie aiguë ou chronique.

Pour les personnes souffrant de stress chronique, comment le dentiste peut-il jouer un rôle utile dans le soutien de la santé bucco-dentaire ?



Aider les patients du cabinet dentaire à faire face et à réduire le stress

Il est essentiel tout d’abord d'aider les patients à comprendre le stress et son impact sur leur santé bucco-dentaire. Tout comme il est dans votre intérêt de dissuader le tabagisme en raison de son impact clairement négatif sur l'état parodontal, vous devriez également chercher à aborder le sujet du stress chronique de front, même si vous n'êtes pas un spécialiste de la santé mentale. 

« Le rôle des spécialistes dentaires est de discuter du mode de vie dans un concept plus large que la simple hygiène buccale, ils devraient être plus orientés sur un aspect psychologique », ont écrit Reners et al. dans un article de 2007 sur le stress et les maladies parodontales qui reste d'actualité. Alors que les preuves continuent de renforcer l'existence d'une relation significative entre les deux conditions, les conseils en conclusion de l’article ne font que résonner davantage : « il devrait être obligatoire pour nous d’aider les patients à avoir moins de stress et, au besoin, de les référer à un psychologue ou à d’autres spécialistes dans le domaine de la médecine du stress. »

Tout cela contribue à un récit croissant autour du rôle élargi d’un professionnel dentaire dans la réussite des patients. Notre attention doit aller au-delà des dents et des gencives, conformément à la réalité que la santé bucco-dentaire est irrévocablement liée à la santé systémique et aux comportements des patients.

À un niveau de base, la chose la plus utile que vous puissiez faire en tant que dentiste pour aider les patients à réduire et à faire face au stress est de promouvoir catégoriquement un mode de vie sain. Bon nombre des techniques les plus utiles et les plus éprouvées pour réduire le stress sont liées à cet objectif fondamental : pratiquer une activité physique, suivre un régime alimentaire équilibré et éviter les habitudes nocives comme boire de l’alcool, fumer ou manger des aliments malsains.

Vous pouvez également utiliser ce raisonnement pour renforcer les rituels de soins bucco-dentaires appropriés à la maison. Après tout, les traitements des caries et d’autres problèmes de santé bucco-dentaire ont tendance à devenir des sources majeures de stress pour de nombreux patients. Éviter de telles pathologies est un scénario gagnant/gagnant de ce point de vue !

Découvrez d'autres articles

Souscrivez à notre Newsletter mensuelle